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lundi 23 décembre 2013

Les controverses de l'amnistie: entre attentes et faiblesses

La loi d'amnistie proposée par le Président russe V. Poutine et adoptée par la Douma en l'honneur des 20 ans de la Constitution russe commence à produire ses effets.
Ne pas lier la grâce de M. Khodorkovsky, mesure individuelle, à cette amnistie, mesure impersonnelle, serait une erreur. Ce processus se pose dans un projet politique d'ensemble, car il s'agit de mesures hautement politiques.
En France, historiquement, sous l'Ancien régime, le nouveau Roi lançait une grande amnistie lors des fêtes accompagnant le début de son règne. La monarchie se faisait ainsi peau neuve. Dans une période plus récente, on retiendra dans les années 50 une amnistie concernant les faits de collaboration pendant la Seconde Guerre Mondiale, dans les années 60 ce sont les faits liés à la guerre d'Algérie qui sont pardonnés. Mais à partir des années 80, les infractions suceptibles d'êtres amnistiées sont de plus en plus réduites. L'on en exclue tout d'abord les crimes et délits indélébiles, puis la classe politique se prononce même contre l'amnistie des infractions au Code de la route. Finalement en 2012, les deux candidats aux présidentielles annoncent qu'aucune loi d'amnistie ne sera adoptée lors de leur prise de fonction. La pratique monarchique semble avoir pris fin de facto.
En effet, l'amnistie revêt principalement deux fonction: favoriser la réconciliation nationale et rappeler le bon vouloir du Souverain, ce qui se rapproche très souvent du populisme. Comment analyser à travers ce prisme la loi d'amnistie qui vient d'être adoptée en Russie?
Elle semble totalement décalée. Décalée, car elle ne remplira pas le rôle de réconcialiation nationale et son côté populiste sera justement écrasé par ce premier caractère.
La réconciliation nationale, si réellement elle est nécessaire, ne sera pas le fait de cette loi. Certes, Maria Alekhina (Pussy Riot) a été mise à la gare la plus proche par les services pénitentiaires. Mais il y a peu de chance que cela appaise la société. Parallèlement, de grandes discussions creuses sont lancées autour de la possibilité juridique d'amnistier ou non l'ancien ministre Serdiukov impliqué dans des détournements de fonds à grande échelle. Et cela ne va certainement pas redorer l'image de l'Etat. Pour faire passer la pillule du pardon, M. Khodorkovsky a été libéré, mais par la grâce, autrement dit par une mesure individuelle, qui elle fut une grande réussite politique. L'on attend encore la libération des membres de Greenpeace, qui sait. En fait, dans ce projet d'amnistie, tout le monde se moque des inconnus qui pourront en bénéficier, toutes les discussions ont tournées autour de certaines affaires, comme Bolotnaya et Greenpeace par exemple. ce qui montre le côté totalement artificiel de la mesure.
D'une manière générale, il est possible de penser que le message politique lancé est celui de la fin d'une période. On tourne la page et on recommence. Pour autant, il n'est pas certain que ce message soit suivi par toutes les individualités remises en liberté, ni qu'il soit compris et accepté par la société.
L'on a déjà vu la publication sur Itar-Tass, juste au moment de la conférence de presse de Khodorkovsky en Allemagne, d'un appel de la veuve de l'ancien maire de Nefteiugansk, assassiné selon un certain nombre de personnes par le clan Yukos, demandant à M. Khodorkovsky de profiter de sa grâce pour se repentir de ses crimes.
Bref, l'effet politique bénéfique de la grâce peut être réduit tant à l'intérieur par les personnes qui ne sont pas prêtes à pardonner sans condition et à l'extérieur par une utilisation géopolitique de la décision. Par ailleurs, l'amnistie, qui ne pourra que faire des mécontants, car elle fonctionne par cétégories juridiques quand les attentes sont très concrètes, et risque de ternir le bénéfice politique qu'il eût été possible de tirer du recours à une grâce individuelle ciblée.
D'un manière générale, pour terminer, il n'est pas certain que le recours à l'amnistie, en temps de paix, soit très judicieux. Mais c'est une décision politique, voyons donc dans le temps les effets qu'elle produira. 

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