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vendredi 10 février 2012

La CEDH défend les droits de la défense des personnes privées de liberté

Voir: http://sutyajnik.ru/news/2012/02/1916.html et l'article de A. Demeneva sur le placement en clinique psychiatrique http://sutyajnik.ru/articles/424.html

La CEDH vient de rendre un arrêt, le 7 février (Proshkin contre Russie) contre la Russie. Le requérant arguait de la violation de ses droits, notamment de sa détention illégale en 2003, de son impossibilité à former appel contre la décision le privant de liberté et des entraves qui lui ont été posées afin de l'empêcher de participer physiquement à son procès.

Pour la petite histoire, tout a débuté par un banal accident de la circulation. Le fils d'un collaborateur du fond boursier de la ville de Perm (dans l'Oural) utilise illégalement la voiture de service de papa et provoque un accident avec M. Proshkin.

Sur quoi, tout à fait logiquement, M. Proshkin dépose un recours en justice pour obtenir réparation du dommage matériel et moral qui lui a été causé, se tourne vers les forces de l'ordre pour trouver de l'aide, mais en vain. En désespoir de cause il s'adresse à la mère du jeune homme afin de se faire rembourser, au moins, les frais de réparation de sa voiture. Et à ce moment là, l'histoire prend une tournure ubuesque.

Au lieu de régler à l'amiable les conséquences du dommage, ce qui se fait habituellement, la famille du responsable de l'accident se retourne contre M. Proshkin et une enquête pénale est ouverte contre lui. La famille argue d'un harcellement constant.

Il est incarcéré. Condamné tout d'abord à 7 ans de réclusion. La famille, avec le soutien d'experts, obtient même l'incarcération en clinique psychiatrique, se fondant sur le fait que le harcellement ne faisait qu'augmenter, allant juqu'à des menaces de mort. Selon l'expertise, il souffrirait de schizophrénie et présenterait un danger pour la société. En février 2003, il fut reconnu coupable de faits d’extorsion aggravée commis entre 1996 et 1999, mais la juridiction de jugement le déchargea de toute responsabilité pénale, l’ayant estimé frappé d’incapacité mentale. M. Proshkin considère alors que, de janvier 2003 jusqu’à son transfert dans un hôpital psychiatrique en août 2003 – dont il est ultérieurement sorti –, son placement dans un établissement carcéral ordinaire était irrégulier. Ne pouvant trouver justice en son pays, il se retourne devant la Cour européenne des droits de l'homme, qui condamne la Russie.

Le requérant invoque alors devant la CEDH la violation de l’article 5 § 1 (droit à la liberté et à la sûreté) et de l’article 5 § 4 (droit pour tout détenu de faire examiner à bref délai par un tribunal la légalité de sa détention), il estimait que le recours formé contre sa mise en détention n’avait jamais été examiné. Sur le terrain de l’article 6 §§ 1 et 3 c) (droit à un procès équitable), il plaidait en outre que sa présence devant les tribunaux qui avaient statué sur sa responsabilité pénale n’avait pas été assurée.

La CEDH a décidé de reconnaître deux violations de l’article 5 § 1 (en ce qui concerne la période de détention à partir du 27 janvier jusqu’au 18 février 2003 et celle à partir du 18 février jusqu’au 18 août 2003). Mais également la violation de l’article 5 § 4 et la violation de l’article 6 §§ 1 et 3 c).

Cet arrêt renvoie à deux pratiques - trop - courantes en Russie. La première est la difficulté faite aux personnes privées de liberté de participer physiquement à leur procès. Théoriquement, il leur suffit d'en présenter la demande, pour que la procédure soit assurée. Mais, dans les faits, les demandes se "perdent" et ils ne peuvent réaliser leur droit.

La seconde pratique concerne les délais trop longs concernant la décision sur l'hospitalisation forcée dans un établissement psychiatrique. Si la loi prévoit 5 jours, celui-ci dépasse en moyenne le mois.

Il reste à garantir la réception en droit interne des décisions de la CEDH dans ce domaine. Réception qui ne peut se faire que par une réforme substantielle de la pratique judiciaire, en plus de celle de la législation. Sans oublier que ces faits sont très révélateurs du rapport de l'Etat à la personne: un individu privé de liberté n'est pas privé d'humanité, il ne peut donc pas être privé de ses droits. Mais la modification de la vision de l'Homme dépasse largement le cadre strictement juridique.

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